Voici quelques extraits du livre de Maître Kosen, Chronique de la Grande Sagesse.

Mushotoku, c'est faire les actions sans but, faire l'action pour l'action, sans en attendre quoi que ce soit. Mushotoku est une attitude fondamentale du zen.

Quand un néophyte pense à mushotoku, c'est à dire l'action sans objet, il le comprend avec son mental, avec son cerveau intellectuel, il plante cela comme un dogme : « Il ne faut pas avoir de but ». Mais cela n'a rien à voir avec « Il ne faut pas...» Dès le moment où l’on pense : « Il faut, il ne faut pas », ça ne peut pas être mushotoku. C’est très difficile à intégrer, particulièrement pour un débutant.

Mon enseignement à ce sujet, c'est que la posture physiologique de zazen induit mushotoku. De par la position du corps et spécialement l’aplomb correct de la tête, le cerveau est placé dans une dynamique mobilisant des zones spécifiques qui transcendent tous les buts humains. C'est tout simple : lorsque la posture de zazen est bien prise, on ne peut pas, je le redis, on ne peut pas ne pas être mushotoku. Si vous ne l’êtes pas, c'est que vous ne prenez pas la posture correctement.

Qu’on le veuille ou non, au sein du zazen nous sommes mushotoku.


Il y a deux choses importantes dans le zazen :

L’une, c’est oublier !Extrait du livre Chronique de la Grande Sagesse, de Maitre Kosen

L’autre, c’est se souvenir !

Certains disent : « Dans ma vie, j’aime apprendre, je veux apprendre plus, toujours apprendre. J’ai eu beaucoup de maîtres, un maître japonais, un maître indien, un maître ceci, un maître cela, j’apprends, j’apprends ». Mais qu’y a-t-il donc qu’on ne sache déjà ? On sait tout ça depuis le début, depuis toujours. Depuis l’éternité, on sait tout, donc il ne s’agit pas d’apprendre mais de se souvenir.

On a peur de mourir et quand on meurt, on se souvient qu’il n’y a jamais eu ni vie ni mort.

Mais alors le corps ? C'est toute une histoire de créer un corps : neuf mois. Mais comparé à l’âge de notre terre, qu’est-ce que neuf mois ? Ce n’est même pas une fraction de seconde. Neuf mois de notre temps pour oublier ce qu’on a tant cherché à se souvenir. Généralement, on oublie ces neuf mois et même les premières années, les premiers pas, tout cela n’est plus qu’un souvenir diffus. Un, deux ans et à nouveau, on est là, amnésique, sur cette terre.


On demande à quelqu’un :

« Tu as bien dormi cette nuit ?

- J’ai super-bien dormi, je n’ai pas rêvé. Je suis allé me coucher et je me suis endormi d'un coup, je n’ai pas rêvé de toute la nuit.

- Moi j’ai rêvé que j’avais des insomnies. Pendant toute la nuit je rêvais que je me retournais d’un côté, de l’autre. Je n’ai fait qu’un rêve : je rêvais que j’avais des insomnies.

Tout d’un coup le premier :

- Oh, ça y est ! Je me souviens de mon rêve ! Finalement j’ai rêvé, j’ai fait un sacré rêve, très, très conscient. »


chronique de la grande sagesse  d’après le Prajñā Pāramitā sutra, un livre de Maitre KosenIl est très important d’être informé du fait que la communauté scientifique a constaté et démontré que le rite religieux fondamental, qui consiste à enterrer et à vénérer ses morts en reliance avec une force qui nous dépasse, n'était lié ni au mental ni à l'intellect. En effet, les scientifiques ont découvert que les hommes préhistoriques pratiquaient déjà des rites funéraires et religieux, alors qu'ils n'utilisaient pas encore le langage articulé lié à l'intellect et au mental. Ils ne savaient pas parler. Ils utilisaient sans doute des onomatopées ou des pantomimes dans le but d'exprimer les choses fondamentales comme manger, faire l'amour, fuir, mais le langage est venu bien plus tard.

On en déduit que cette reliance à dieu, la méditation, les rites fondamentaux, ne sont pas liés au cerveau intellectuel, mais au cerveau profond.

Sensei nous enseignait toujours : « Zazen est la religion avant la religion ». Pourquoi ? Parce qu’elle existait avant les mots.

On peut en déduire que les religions basées sur des livres, des textes ou des écrits compliquent considérablement les choses, parce qu'elles ne s'adressent pas à la partie adéquate du cerveau. Voilà pourquoi le dogme apparaît, puis la rigidité qui mène au fanatisme.


Penser comme tout le monde ou vouloir absolument se distinguer des autres, vouloir être vu ou au contraire demeurer caché, s’attacher à sa noblesse ou au contraire à sa vulgarité, riche ou pauvre, ce sont là des points de vue mondains limités, en réaction à une réalité sociale souvent frustrante ou violente. Ce sont des points de vue de gens qui croient à l’existence de leur ego puisque, sans ego, comment s’intégrer à cette société ? pensent-ils.

Beaucoup croient que la réalité se limite à la réalité sociale et, pire encore, tiennent pour vraie la réalité sociale de ce qu’ils lisent dans les journaux ou de ce qu’ils voient à la télé. De plus en plus rares sont ceux, comme le dit une chanson « qu’ont pas Internet et matent les faits-divers de leur fenêtre ». La grande majorité ne dépasse jamais, de toute sa vie, le point de vue mondain, et meurt en invectivant Dieu de n’avoir pas fait son travail ou de ne pas exister.

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