Question

"Eh bien, eux qui aiment tant citer les paroles de Kodo Sawaki dans leurs kusen, pourquoi n'ont-ils pas l'idée parfois d'imiter ses actes?
Lui qui a justement reçu le shiho du successeur de son maître, ancien condisciple.
Malgré le fait que dans sa jeunesse il y avait eu entre eux une relation de compétition, il l'a fait avec humilité, car c'était de la lignée de ce maître et pas d'une autre qu'il voulait être successeur.
Voilà l'exemple d'un moine authentique."
Telle n'a pas été l'attitude de Maître Deshimaru qui a préféré recevoir la transmission d'un maître de la Sotoshu que d'un ancien condisciple de maître Kodo Sawaki qui avait pourtant donné sa succession à plusieurs personnes avant de mourir.
Pourriez vous m'éclairer sur ce point ?
Merci



Réponse de Maitre Kosen

Étudier la transmission est très important, disait maître Dogen Zenji. C'est pourquoi je vais prendre la peine de vous répondre.
Tout d'abord, Shiho et transmission sont deux choses différentes bien que non séparées. Dans le zen on considère que le subjectif doit se refléter ou être certifié par l'objectif. Donc, la transmission doit selon notre tradition être certifiée par le Shiho.
Le shiho, est une cérémonie, un rite initiatique, qui contient en lui-même également une part de transmission subjective, du maître au disciple.
La transmission, elle, est un acte objectif, du maître envers son disciple. Il lui transmet littéralement, s'il l'en pense digne, une énergie froide et lumineuse que l'on appelle la moelle du zen. Cette énergie se transmet comme de l'eau d'une bouteille à une autre bouteille. Seulement, ce phénomène n'étant connu que du maître et du disciple, il ne peut être considéré comme objectif aux yeux des autres personnes. Il est donc nécessaire, que cette transmission soit certifiée par le Shiho, document qui est remis lors du rituel dont je vous ai parlé précédemment.
Il est bien évident que c'est la transmission qui est importante avant tout, mais si elle est authentique, elle doit se révéler objectivement au su de tous, le moment voulu.
Celui qui a reçu la vraie transmission de son maître, n'a pas besoin du Shiho et dans de nombreux cas celui qui a reçu un Shiho, n'a pas reçu nécessairement la moelle d'un vrai maître. Il est à noter que parfois, les deux, transmission et Shiho se font au même moment. Venons en maintenant à votre question proprement dite, c'est à dire, à l'explication historique des choses.
Comprenons que l'histoire de la transmission de maître en maître depuis Bouddha a été pour chaque successeur une histoire spécifique et qu'il serait stupide de croire que l'histoire va se répéter plusieurs fois, ou à chaque fois, de la même manière.
Mais là où l'on peut en retirer une leçon et avancer dans la compréhension de ce thème, c'est en comprenant que l'histoire même de la transmission est l'expression de l'esprit lui-même et de la vérité cosmique elle-même.
Elle est toujours un message et un enseignement pour les pratiquants des trois temps, qui ont les yeux et le coeur ouverts et qui ne sont pas tentés de mentir, à eux-mêmes et aux autres, par le souci de l'apparence et du succès mondain.
Maître Kodo Sawaki a donné, je crois, cinq shihos mais, il n'a donné que trois transmissions : "la chair", à une nonne qui c'est coupé le doigt pour obtenir la permission de le suivre, alors qu'elle était précédemment disciple d'un autre maître et que Kodo la refusait comme disciple. Elle fut la première des disciples, dans la connaissance et la couture des Kesas.
Un moine, qui fut chassé de la sangha sur des accusations mensongères du secrétaire de kodo qui était à cette époque "Nishiyama kocho" Ce moine vécu tout le reste de sa vie en ermite, dans une petite hutte où il ne faisait que zazen. Mon maître l'aimait et le respectait beaucoup et lui rendait visite chaque fois qu'il allait au japon. Lui reçu "la chair". Il était le premier, dans la pratique du zazen. Et puis Deshimaru qui reçu la "moelle du zen", juste avant la mort de son Maître. Il était l'incarnation d'un grand bodhisattva et d'une dimension innée, supérieure à tous les autres et Kodo Sawaki le savait depuis toujours.
Vu la personnalité de Deshimaru, il ne s'est jamais soucié de certifier sa transmission par un shiho et un shiho de qui?
Il n'avait bien entendu besoin de personne pour faire ce qu'il avait à faire et certainement pas de Narita roshi, qui, bien qu'ayant reçu l'enseignement de Kodo Sawaki durant de nombreuses années, était avant tout le disciple de son propre père, qui demanda à Kodo Sawaki si par amitié pour lui, il lui ferait la faveur de donner en son nom le shiho à son fils. Il est à noter également, que mis à part les disciples qu'il a emprunté à mon Maître, à tort ou à raison, Narita roshi n'a jamais eu aucun disciple, ni aucune sangha.
Pour ce qui est du Shiho de maître Deshimaru: Quelques années avant sa mort, il accepta néanmoins, d'objectiver sa transmission, en recevant le shiho. Mais le shiho de qui? Tout simplement de la plus haute autorité du zen japonais de l'époque, l'équivalant du pape, le zenji de Heiheiji, Hiamada Rerin. Voila l'histoire tel que "moi" héritier de Maître Deshimaru, je la raconte.
Vous pourrez aisément remarquer, que ceux qui n'ont pas reçu la vraie transmission de leur maître, sont incapables d'exprimer quelque chose de cohérent et de clair à ce sujet, ne semant que la confusion autour d'eux et finissant même par laisser insulter leur propre maître.
KOSEN




REPONSE A LA REPONSE:


cher kosen,
Comme vous dites : il serait stupide de croire, que l'histoire va se répéter plusieurs fois, ou à chaque fois, de la même manière.
Je n'ai pas connu Maitre Deshimaru mais je pratique depuis assez longtemps pour avoir connu votre départ de l'AZI. A ce moment, j'ai vécu une souffrance comme si ma propre famille se disloquait et en même temps, j'ai ressenti comme si quelque chose de fort qui était jusque là porté par l'ensemble du groupe s'évaporait et disparaissait avec cette scission. Quelque chose dont j'avais été témoin et qui n'existait plus qu'en moi même.
Depuis lors je suis cette voix à l'intérieur de moi m'aidant de l'interaction avec différents maitres pour suivre mon propre chemin, pour réaliser cette chose que j'ai vu au sein de l'AZI du temps que vous y étiez encore. Quoiqu'il en soit j'espère que l'AZI et vous finirez par vous réconcilier totalement et trouver l'unité. Cette unité, je tâche de la réaliser d'abord en moi même en ne voyant pas d'opposition entre ces deux chemins.
Bien à vous.


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